Le projet
Pourquoi cette conférence gesticulée ?
Ça devait être en 2006, Attac organisait son université d’été pas très loin de chez moi et avait invité Franck Lepage, « l’inventeur » du concept des conférences gesticulées dont il présentait sa première création. Bluffé par l’intelligence de ce format qui réinventait radicalement de genre de la conférence pour en faire un génial levier d’éducation populaire, je m’étais promis qu’un jour je m’y essaierai.
Cela a pris quelques années quand même, « le temps d’en trouver le temps » grâce à la retraite et surtout le temps de trouver le sujet dont j’aurais envie de parler sous cette forme.
C’est donc en 2018 que je me suis lancé dans l’écriture de cette conférence sur les (biens) communs, que j’ai très vite baptisée « tous propriétaires » en référence au slogan démagogique et irresponsable brandi en 2007 par Nicolas Sarkosy.
Comme je le raconte dans ma conférence, j’ai découvert cette notion des communs à l’occasion du prix Nobel d’économie attribué à Elinor Ostrom et pris conscience de la résonance qu’elle avait au regard de mon parcours et de mes convictions.
Mais ces ces presque dix ans n’ont pas été de trop pour passer de la découverte du concept à sa compréhension, de sa compréhension à la capacité d’en parler, de l’envie d’en parler à l’écriture et la mise en scène de cette conférence.
Le making off
Comment conçoit-on une conférence gesticulée ? Une petite dizaine d’organismes de formation de l’Education Populaire proposent des stages pour écrire et mettre en scène son projet de conférence. En ce qui me concerne, j’ai eu envie de me débrouiller par moi même, non pas que je jugeais ces formations inutiles ou mal conçues (plusieurs de mes ami-es les ont suivies avec succès), mais parce que j’ai eu envie de relever le défi intellectuel et personnel que représentait d’une part, le travail de synthèse et de pédagogie sur un sujet aussi complexe et d’autre part, le risque de monter sur une scène en donnant de soi personnellement.
Cela m’a pris une bonne année, je me suis d’abord attelé à recueillir la matière première de ma conférence, c’est à dire les idées, les analyses, les concepts que j’avais moi même mis du temps à comprendre et que je voulais maintenant partager. Je me suis créé pour cela une bibliothèque d’extraits de textes, que j’ai ensuite cherché à illustrer par des exemples concrets.
Puis dans un deuxième temps, je me suis interrogé sur mon parcours personnel et qui faisait que cette thématique des communs m’avait à ce point interpellé. C’est ce qui m’a permis d’imaginer l’introduction de la conférence où je parle de ma sensibilisation au thème de la propriété et de mes expériences coopératives.
La suite a consisté à écrire un plan et un déroulé, en essayant d’imaginer comment alterner les savoirs chauds, les savoirs froids, des temps d’interaction avec le public et des séquences jouées sous forme de sketches. Il a fallu laisser mûrir les idées pour que le fil conducteur apparaisse progressivement.
Puis est venue la phase d’écriture. Bien que je ne voyais pas « dire » un texte appris par cœur, j’ai éprouvé le besoin de rédiger mon propos dans un style parlé. Cela m’a permis de rôder certaines phrase que je vais ensuite utiliser de manière récurrents comme « je ne suis qu’un pauvre mec » ou encore « Elinor je t’adore ».
Il restait enfin à me mettre en scène, moi qui n’avais jamais fait de théâtre ! Je me suis appuyé pour cela sur mon beau-frère Denis, comédien et metteur en scène, qui a accepté de me faire travailler en résidence chez lui pendant une semaine. Je ne cache pas que ça a été le moment le plus difficile de cette aventure. Habitué que j’étais à donner des conférences sérieuses et classiques, j’ai eu beaucoup de mal à intégrer et accepter les codes de la scène, ce qui m’a valu des enguelades mémorables de mon beauf. Mais on y est arrivé et j’ai pu jouer une première fois ma conférence « en sortie de résidence » devant un petit cercle familial et amical.
Enfin, quelques semaines plus tard, je jouais ma « première » devant une centaine de personnes réunies à l’occasion des trente ans de la coopérative Sapie dont j’avais été un des co-fondateurs.